L’éveil aux langues n’est pas l’apprentissage des langues

Lors de certaines interventions que je donne en public ou encore lorsque je lis les commentaires parus sur un site éditorial à propos des imagiers multilingues, je m’aperçois que certaines personnes confondent « éveil aux langues » et « apprentissage des langues ».

Les imagiers multilingues de Migrilude ne sont pas des outils ni des manuels d’apprentissage d’une ou de plusieurs langues. Ce sont des corpus mettant en images des mots et des situations en plusieurs langues pour exposer la diversité linguistique. Il y a déjà bien à faire à observer sur une page le même mot traduit en dix langues et à s’amuser à observer leur graphie, comparer les similitudes, les différences.

« Et pour les langues dont on ne comprend pas l’alphabet, comme le russe », me demandent certains, « comment fait-on ? ».

Il y a aux moins deux possibilités.

On observe sans comprendre. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, il ne s’agit pas là d’une activité neutre ou inutile. Les hommes qui ont essayé de comprendre leur environnement ont procédé ainsi au départ, en observant attentivement.

-          Certains décident de partir à la recherche du sens. Ils peuvent donc ensuite aller sur Internet et télécharger l’alphabet russe et en découvrir les lettres. Ils peuvent aussi demander à une personne russophone de leur entourage de leur donner quelques explications. J’aime cette idée que les livres réunissent les gens et qu’ils soient vecteurs de rapprochement entre individus.

-          D’autres décident de ne pas adopter de méthode systématique et de se laisser rêver autour des lettres.

On peut encore essayer de les recopier, pour s’amuser, gratuitement, pour le plaisir de faire une chose apparemment inutile mais qui peut aussi nous emporter sur des territoires inconnus de nous-mêmes, dans une découverte graphique, dans l’exploration de son propre langage en inventant ses propres signes.

Certains parents me rapportent que leurs enfants s’essayent ainsi à recopier les lettres ou les caractères arabes ou les idéogrammes chinois, pour le plaisir d’écrire ou de dessiner.

Les adultes ne sentent souvent démunis et pris en défaut lorsqu’ils ne comprennent pas ou lorsqu’ils ne peuvent pas donner d’explication à leurs enfants ou à leurs élèves. Pourtant il n’y a de honte à dire à un enfant : « je ne peux pas prononcer ce mot, ni même le lire, mais je sais que c’est du chinois et comme tu le vois, cela s’écrit vraiment différemment de l’alphabet que nous utilisons chez nous. » Pour un enfant de 3 ans, cette explication est tout à fait suffisante.

Une enseignante d’une école enfantine de la Chaux-de-Fonds (Suisse) me racontait qu’elle procédait exactement de cette manière avec ces élèves et que cela fonctionnait très bien.

L’éveil aux langues n’est pas l’apprentissage des langues
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